Cupressus  atlantica

Gaussen, Le Monde des Plantes, Paris, (1950) No. 270-271, p.55-56.

Espèces nouvelles de Cyprès :

Cupressus atlantica au Maroc, Cupressus Lereddei aux Ajjers

Par H. GAUSSEN.

    Le Cyprès des Goundafa, vallée du Grand, Atlas, au S. de Marrakech (vallée de l’Oued N'Fis), a été découvert par l'Inspecteur WATIER, en 1921; il a été retrouvé tout autour du « Golfe du Sous » en stations isolées. Tous les auteurs l'ont considéré comme appartenant à l'espèce sempervirens L.


1. C. Dupreziana (d'après CAMUS).
2. C. Lereddei, type moyen.
3. C. atlantica, type moyen.
4. C. sempervirens (cône long).
5. Id. (cône court), sur le même arbre que 4 (4 et 5 d'après CAMUS).
Tous les dessins sont en grandeur naturelle. Les cônes d'un même individu sont beaucoup plus semblables les uns aux autres chez C. Lereddei et C. atlantica que chez C. sempervirens qui présente une grande variabilité.

    Une étude plus complète, à l'occasion de mon voyage en 1948, a montré que cet arbre, dont la station est très éloignée de celles des autres Cyprès méditerranéens, est une espèce nettement distincte en particulier par les caractères du cône.
    Une étude complète des Cyprès méditerranéens est en rédaction. Je me borne ici à indiquer une brève diagnose de l'espèce nouvelle.

    Cupressus atlantica : Habito Cupressi sempervirentis fere similis sed saepe glaucior.
    A C. sempervirente differt : strobilis maturis sphaericis aut fere sphœricis; circa 18 mm.-22 mm. in diametro, ramulisque brevioribus fere decussatis.


    Type dans l'herbier du Laboratoire forestier de Toulouse. Idni. - 15-5-1948.
    Les cônes sont sphériques et petits alors que ceux de C. sempervirens sont beaucoup plus gros (souvent 3,5 cm.) et ovoides. Il semble, d'après les échantillons plantés près d'Alger côte à côte avec C. sempervirens, que la maturité des cônes soit un peu plus tardive. M. le Conservateur PUTOD qui a eu l'amabilité de me le communiquer' avait constaté leur différence.
    Ce Cyprès n'est pas à confondre avec C. Dupreziana A. CAMUS du Tassili des Ajjers. Le cône de ce dernier est subovoïde, nettement plus long que large.
    Ici se présente une difficulté :

    La diagnose de C. Dupreziana indique pour 1e cône une longueur de 12 à 18 mm, et de 10-15 mm. de large avec10 écailles. Or, sur plusieurs centaines de cônes apportées par M. LEREDDE de son voyage aux Ajjers (expédition BERNARD, 1949), il n'y en a aucun qui soit inférieur à 19 mm. et plusieurs dépassent 24 mm.; en largeur ils ont de 16 à 20 mm.; la plupart ont 12 écailles. Ou bien Mlle CAMUS a eu entre les mains un échantillon d'un arbre exceptionnel, il n'y en avait qu'un seul, et cet arbre seul mérite le nom de Dupreziana, celui de M. LEREDDE étant d'une espèce différente, ou bien les deux types appartiennent à la même espèce, et Mlle CAMUS a eu la malchance de décrire comme type un arbre aberrant. Quoi qu'il en soit, sa diagnose ne s'applique pas à l'arbre de LEREDDE qui est représenté par de nombreux exemplaires dans la région, de Tamrit. Comme les règles ne permettent pas de modifier une diagnose publiée et que, d'autre part, il n'est pas impossible qu'il y ait deux espèces aux Ajjers, je décris l'espèce de LEREDDE.

    Cupressus Lereddei : Arbor habito Cupressi Duprezianae similis ; strobilis longioribus, circa 18-24 mm., longis 16-20 latis ; squamis 10-12 sœpe 12.

    Type dans l'Herbier du Laboratoire de Toulouse. Tamrit - 22-5-1949.
    Le Cyprès de l'Atlas est déjà bien connu des forestiers marocains qui apprécient la fixité de son type et la remarquable résistance à la sécheresse. Il est sans doute susceptible de rendre grands services dans les reboisements des contrées où le climat comporte de longues périodes très sèches.
    A l’état naturel il se trouve sur les deux versants du Grand Atlas en stations isolées. M. l'Inspecteur FRANCLET, d'Agadir, m'a procuré une magnifique collection d'échantillons que j'étudierai dans le mémoire en préparation.
    Rappelons l'opinion de JOUBERT et BUROI.LET (1934) qu'il faut un sol suffisamment riche pour le Cyprès et qu'il ne peut pas être utilisé comme les Pins pour le reboisement de sols très dégradés. Ces auteurs parlaient de C. sempervirens, seule l'expérimentation pourra décider pour C. atlantica.
    D'après les documents de BOUDY (1948), le Cyprès de l'Atlas se contente des sols les plus médiocres. On l'a utilisé au Maroc dans les stations particulièrement déshéritées (périmètre de l'Oued Beht entre autres) et partout il a donné d'excellents résultats.
    Les Cyprès du Tassili des Ajjers sont encore trop jeunes dans les cultures pour qu'on puisse donner une opinion sur leur intérêt.
    Il y a encore un Cyprès près de Maktar en Tunisie. N'ayant pas terminé son étude, je crois prudent de réserver mon opinion. Il faut en effet pouvoir comparer au Cyprès de Cyrénaïque et à celui qui a été récemment découvert au Sinaï.
    Le genre Cyprès a ainsi un groupe d'espèces affines, variations d'une souche commune par ségrégation géographique.